Ce psautier, qui aurait été exécuté au monastère du Saint-Sépulcre à Jérusalem, est un bel exemple de fusion entre l’art occidental et l’art byzantin. En effet, il présente un programme et une iconographie qui suit la tradition byzantine associés à des éléments spécifiquement occidentaux. En tout six artistes et un scribe, vraisemblablement d’origine française, ont pris part à cet ouvrage. Le travail effectué par ces artistes reflète assez bien leur origine propre. Il semblerait qu’une partie d’entre eux étaient originaires de France ou d’Italie. Dans la partie introductive, vingt quatre miniatures en pleine page ont été peintes sur un fond doré. Elles représentent des scènes de la vie du Christ accompagnées d’inscriptions en grec. Elles sont l’oeuvre d’un peintre d’origine française. Cet artiste est vraisemblablement né dans le Royaume latin de Jérusalem et a probablement beaucoup étudié l’art byzantin, peut-être même à Constantinople. Il se prénommait Basile (« Basilius me fecit », f.12v). Il s’est fortement inspiré des modèles picturaux constantinopolitains du XIe siècle. La composition des scènes, le jeu des couleurs et des draperies ou encore les types d’ornements reflètent assez bien les références byzantines connues par cet artiste.
En revanche, l’insertion en début du manuscrit de plusieurs miniatures liées au Nouveau Testament est une invention occidentale du XIe siècle. Plusieurs de ces scènes permettent d’illustrer ce métissage culturel, particulièrement au niveau des détails iconographiques.
La représentation des Saintes femmes au Tombeau montre les trois femmes décrites dans l’Évangile de Marc (16 :1-8), généralement préféré par les Occidentaux, et non les deux femmes mentionnées dans l’Évangile de Matthieu, généralement choisi par les Byzantins jusqu’au XIIIe siècle.
Des éléments iconographiques typiquement byzantins se retrouvent par contre avec l’ange assis sur la dalle du tombeau du Christ, accompagné des soldats endormis. Ils proviennent de l’Évangile de Matthieu (28 :1-10) et non plus de celui de Marc.
Les vingt quatre enluminures du Nouveau Testament étaient suivies d’un calendrier composé des douze signes du zodiaque, chacun placé dans un médaillon. On trouve également huit initiales en majuscules, sur fond doré, qui occupent une pleine page. Elles correspondent à la division liturgique des psaumes. Des initiales également dorées complètent et décorent l’ensemble des textes du psautier. À la fin du manuscrit sont représentés les portraits de neuf saints, placés dans des panneaux qui occupent la moitié d’un folio.
La reliure de ce psautier reflète les mêmes tendances stylistiques. Le travail de sculpture de cette reliure en ivoire évoque des caractéristiques byzantino-occidentales. L’ensemble des motifs géométriques composants le pourtour de la reliure renvoie, par contre, à des emprunts à l’art islamique, ce qui montre bien les contacts qui ont existé entre la culture chrétienne et la culture islamique au Proche-Orient, malgré les oppositions politiques et religieuses.
La datation ainsi que le patronage de ce codex ont été beaucoup discutés. Aucun nom n’apparaît directement au sein de cette œuvre. Toutefois il semblerait qu’il ait été exécuté pour la reine Mélisande de Jérusalem. En effet, plusieurs références sont faites aux membres de sa famille dans le calendrier des douze zodiaques. De plus, la présence de caractéristiques occidentales et byzantines rappelle le contexte culturel du Royaume latin de Jérusalem. Le commanditaire pourrait être le mari de Mélisande, le roi Foulque, comte d’Anjou, qui l’aurait offert en cadeau à sa femme entre 1134-1135.
Source : Qantara Patrimoine méditerranéen https://www.qantara-med.org/public/show_document.php?do_id=663